Télétravail depuis Montréal - Témoignage d’une collaboratrice de Zalis

 

Avec le tournant du COVID-19, l’année 2020 a été pour certains la découverte du télétravail, pour d’autres le partage avec les collègues d’une habitude déjà ancrée dans leur quotidien.

On pourrait trouver de nombreuses qualités à ce mode de travail; éviter les transports en commun ou les bouchons matinaux, être plus présent dans le cadre familial pour ceux vivant en couple ou au sein d’une famille ou encore se sentir davantage autonome en organisant soi-même ses horaires, « calls », réunions, et productions et ainsi libérer plus de temps pour d’autres activités.

Loin de tous ses avantages, il y a également une réalité qui creuse un fossé de solitude pour les personnes vivant seules; le fait de ne plus se confronter au monde extérieur que cela soit en sortant de chez soi, prendre l’air pour se rendre au travail, ou échanger avec ses collègues au fil des journées et semaines.

Le télétravailleur solitaire se retrouve face à son ordinateur, le téléphone posé à côté, son seul contact humain est alors par le biais de ces technologies, et si une très bonne responsabilisation de son planning ne s’impose pas à lui; les journées peuvent paraitre longues, assis à son bureau ou ses bureaux de bonne fortune créés au fil de la journée pour l’occasion (table à manger, canapé, sur un tapis, sur sa terrasse, parfois même sur son lit ou pour les plus sérieux au bord d’un bureau dont il ne se détachera qu’au petit soir).

Le télétravail, semble-t-il, pourrait être intéressant pour les personnes hyper-responsables, capable de découper sur le fil du rasoir leurs journées, entre obligations, productions, échanges téléphoniques avec les collègues ou clients et quelques pauses à ne pas négliger pour prendre l’air et croiser un peu d’humanité afin de ne pas se cloisonner des semaines entières et rentabiliser par la même occasion les dépenses caloriques qu’apportaient les nombreux aller-retours au sein du bureau, les marches lors de la pause du midi ou encore les trajets pour se rendre au bureau. Auquel cas, le télétravailleur sentira le besoin de vivre une vie sociale à la sortie de sa maison-bureau, dans la soirée. Seulement, ses proches non télétravailleurs, de leur côté, rentreront chez eux, épuisés, après une journée riche en déplacements, contacts réels, et forcément chargés de stress, auront besoin d’un sas de décompression chez eux, au calme, en solitaire. Voilà pourquoi et comment une fracture sociale pourrait rapidement se creuser.

Il faut beaucoup de courage pour être autant productif qu’au bureau, depuis chez soi. L’humain aime sentir un regard approbateur sur lui quand il travaille, une certaine motivation en émane lui permettant de se surpasser et d’être productif; il semblerait plus que seul chez lui, face à lui-même comme unique juge de son bon travail.

Le bureau amène également quant à lui son lot de surprises, que cela soit au travers des discussions avec les collègues, au croisement de quelques clients ou au carrefour d’une rue pendant la pause : la vie. Travailler depuis chez soi tend à une certaine monotonie, les journées se ressemblent, les couleurs autour de soi restent les mêmes, pas de contacts physiques, de réels sourires, même les fâcheux désaccords viennent à manquer, les moments latents où les regards se croisent, sous-entendent une pensée commune ou attisent la motivation pour aller au bout de la journée aussi fatigante fût-elle.

En télé-travaillant, et suite au confinement généralisé, l’humain a pu constater à quel point, loup solitaire avéré ou fou du roi né, le besoin d’un contact humain est primordial, à quel point l’être humain est un être profondément social.

En conclusion, je propose de réfléchir à cette interpellation de Sartre :

« « L'enfer, c'est les Autres » a toujours été mal compris. On a cru que je voulais dire par là que nos rapports avec les autres étaient toujours empoisonnés, que c'étaient toujours des rapports infernaux. Or c'est autre chose que je veux dire. Je veux dire que si les rapports avec autrui sont tordus, viciés, alors l'autre ne peut-être que l'enfer. Pourquoi?   Parce que les autres sont au fond ce qu'il y a de plus important en nous-mêmes pour notre propre connaissance de nous-mêmes. »

L’Homme a besoin de l’Homme pour attester qu’il est bien là, que ce qu’il vit est bien réel et donneur de sens, finalement le huis clos 2020 imposé nous aura permis de déceler l’importance de ce miroir qu’est l’Autre.

 

Alors, vers un rebond du digital ? Oui, mais n’oublions pas de continuer de se croiser, s’activer, se sourire et ce même derrière un masque.

 

Alexandra Cohen

ZALIS MONTREAL